Attention "FRAGILE"

Attention "FRAGILE"


« Ne me secouez pas, je suis remplie de larmes. »


Il est un sujet bien souvent tabou dont j’aimerais vous parler aujourd’hui : prendre soin de soi et de l’autre aussi quand on traverse une épreuve de vie. Soutenir. Consoler.


Pas de mode d’emploi, personne qui nous a appris, chose que l’on ne voudrait pas voir, la fragilité dérange, elle bouscule nos idées sur la vie, notre peur de la mort.


Egoïstement, j’ai d’abord pensé à cet article suite à des réflexions que j’ai depuis plusieurs mois suite à ce Covid que j’ai attrapé (ou plutôt qui m’a attrapé) et des conséquences qui m’affectent encore aujourd’hui. Gérer ma propre fragilité. Et comment l’autre et les autres autour de moi l'ont soutenue et la soutienne encore pour la majorité.


J’ai ensuite pensé à une précédente période vécue où la maladie avait aussi fait son apparition.


Puis, aux deuils vécus dans ma famille.


Puis, à tous ces chocs que mes clients me livrent, ces maladies, ces décès aussi, et de comment on y fait face et comment on vit avec.


Je me souviens de mes premières séances il y a plus de 3 ans maintenant, où j’ai accueilli ces 1ères larmes, et de mon sentiment, humain, de me sentir mal à l’aise sur le coup et de ne pas savoir comment les gérer. De ce 1er homme aussi qui a pleuré et où j’ai eu envie de pleurer avec lui, tellement je le trouvais vulnérable et sans défense à ce moment-là.


Et comment j’ai appris, et j’apprends encore à consoler, à dire même que c’est bon de pleurer et laisser faire. M’adapter à chaque personne, car j’entends aussi les « désolée » dès que les larmes montent et dire à chaque fois qu’on ne doit jamais s’excuser de pleurer, qu’il y a encore des endroits heureusement où la fragilité n’est pas vue comme une faiblesse mais comme une force.


Alors je m’écarte à coup sûr d’un sujet sur le coaching et l’hypnose, mais là tout de suite je m’en fiche, je trouve urgent d’en parler, et surtout dans cette période que nous traversons.


Dans cette période, où je sens que les gens vont mal, où des drames peuvent aussi être vécus, je refuse de laisser passer cela en mode « c’est la vie, tout le monde en connaît dans sa vie, on continue ! ». Parce que continuer, oui, mais à quel prix ? Se poser, prendre le temps et consoler me paraît si essentiel.


S’arrêter sur le "pas beau", c’est pas facile c’est sûr mais c’est aussi ce qui fait notre humanité.



I. Qu’est-ce qui nous empêche de prendre soin de nous, que l’autre prenne soin de nous ?


1. Les injonctions


Nos générations avant nous, ont vécu beaucoup d’évènements tragiques, lourds, terribles à vivre certainement, et ont gardé ce sens du secret, du « on ne dit rien, on garde tout et on avance coûte que coûte ».


De cette époque, nous gardons aujourd’hui des injonctions du type :


« Ce n’est pas digne de pleurer ! »
« Ne me mets pas la honte relève toi vite, allez ! »
« Un petit garçon – une petite fille, ça ne pleure pas ! »
« Tu dois être fort ! »
« On est pas des mauviettes dans la famille ! »
« Dans la vie, il faut avancer ! »


Et je pourrais encore en citer beaucoup, la liste pourrait être longue.


Ce qui donne des personnes qui ne s’autorisent pas à être fragile pendant une période suite à un évènement blessant qu’elle vienne de vivre, et/ou des personnes en face qui ne savent pas comment réagir, car les larmes et la douleur font peur souvent à voir.


Beaucoup vont se cacher pour pleurer, ne pas montrer leur peine.


2. Réseaux sociaux et médias où tout doit être beau



Nous vivons dans une époque où ce que nous montrons de nous est beau, le côté glorieux de nos vies. Nos douleurs sont cachées, nos peines aussi.


Les conséquences sont que nous vivons comme si cela n’existait pas et que de ce fait, nous savons encore moins, comment le gérer quand nous devons y faire face.


3. Nos attentes de l’autre et de la vie que nous avions imaginée


Lorsque nous nous étions construit sur une image de nous-même de personne forte et indépendante, et que du jour au lendemain nous vivons l’inverse, cela provoque un choc bien sûr. Bien loin de l’acceptation dans un premier lieu, un sentiment de honte peut même apparaître.


C'est un véritable travail de deuil de cette version de nous qui, là, n'existe plus.


Pour nos proches, ceux avec qui nous vivons, il y a aussi cette image qu’ils avaient de vous, cette personne forte et indépendante qu’ils avaient connue et ils adoraient cette facette-là de vous.


Malheureusement, un coup dur vous a rendu fragile et dépendant, et leurs repères aussi volent en éclats.


Prendre conscience que cette période que vous vivez est une parenthèse, douloureuse et difficile, certes, oui l’autre est fragile, oui il faudra la soutenir peut-être plus que d’habitude. Oui, vos projets communs connaîtront certainement du retard, ce qui ne veut pas dire qu'ils ne se réaliseront jamais.


C’est se dire aussi que c’est période de vie, et une facette à accepter si vous avez décidé de partager votre vie avec cet autre.


II. Alors comment prendre soin de soi quand un évènement nous donne un coup d’arrêt ?


1. Se donner la permission d'aller mal


Se donner la permission de pleurer,
Se donner la permission de dormir plus que de raisons,
Se donner la permission de se recueillir sur notre douleur sans tenter de nous occuper l’esprit ou nous agiter,
Se donner la permission de vouloir rester seul, là, sans forcément donner le change à autrui.


Dans ce monde qui voudrait que tout aille vite, tout le temps, où la fragilité est presque vue comme un gros mot, il est si urgent de nous reconnecter pourtant au rythme de la vie.


Non, ce n’est pas toujours l’été dans nos vies.


Oui, il est des moments où le « rien, le vide » peut toquer à notre porte, ce n’est pas mal, c’est juste là.


PARLER, PARLER, PARLER, de ce qui ne va pas, de ce qui vous pèse, pour ne pas que cela s’imprime dans votre corps et dans votre mémoire sous forme de blessures.


2. Se donner beaucoup de douceur avec soi-même


Souvent, il m’arrive d’entendre que la vie est un combat ou encore que l’on se bat avec la douleur. Je pense vraiment, que ce genre de combat est perdu d’avance.


Car, avant tout, c’est avec nous-même que nous nous battons.


Et de ce fait ce n’est pas un combat qu’il nous faut, c’est de la douceur et même beaucoup de douceur pour arriver à nous construire, ou nous re-construire de nos blessures aussi. Différemment.


Et pour se faire, il faut aussi accepter que ça prenne du temps.


Le temps qu’il faudra pour libérer les pleurs, la tristesse, et toutes nos émotions, le temps pour digérer, puis comprendre et analyser ce qui vient de nous arriver. Le temps pour se relever.


Puis, enfin ré-engager une nouvelle façon de vivre, de nouvelles croyances, une nouvelle vision.


C’est un processus et comme tout processus il prend du temps.


N’économisons pas ce temps, il est essentiel.


Nous finirons par reprendre le train de la vie, à notre rythme.



III. Comment, vous, les autres, pouvaient prendre soin de celui / celle qui, là, souffre ?


Déjà la première chose que je voudrais dire c’est que personne ne sait comment faire pour consoler. Il n’y a pas de mode d’emploi, pas de façon de faire idéale, puisque chaque être humain peut réagir différemment et gère la douleur différemment aussi.


1. Vous demandez ce qui vous met mal à l’aise quand vous voyez l’autre souffrir


A quoi cela vous fait-il écho quand quelqu’un pleure devant vous, a mal ?


Face à quoi cela vous met-il ?


Bien souvent l’idée de sa propre mort, sa propre impermanence est mis en évidence, et nous n’avons pas envie de voir cela.


Identifiez simplement.


2. Demander à l’autre comment le consoler


Car finalement, nous ne sommes pas dans le « faire » ici, mais dans l’ « être ».


Avoir déjà un lien de confiance établi entre les deux personnes et simplement demander à l’autre comment le consoler.


De quoi a t'il besoin là, tout de suite ?


Simplement, quelques fois les mots sont inutiles, un geste peut suffire, une présence aussi.
Si vous ne savez pas quoi dire, préférez le silence, un « je suis là », c’est déjà tout ce qu’il faut, à certains moments.


3. Accepter que vos besoins et vos attentes soient mis en retrait


L’autre souffre, vit quelque chose qui vient anéantir son équilibre, dans son corps parfois, dans sa douleur aussi.
Bien sûr, vous perdez aussi votre équilibre si vous partagez votre vie avec cette personne. Mais déjà se rappeler que c’est là, c’est l’autre qui souffre.


Et accepter que vos attentes, vos demandes de soutien dans votre vie qui continue par rapport à vos soucis au travail ou autre, son écoute, soient pour le moment mis entre parenthèse. L’autre ne pourra pas vous apporter cela pendant un moment, son attention sera portée sur lui, sa douleur et plus tard sa guérison. Cet autre, à ce moment-là, ne peut pas gérer l’extérieur, son monde vient probablement déjà de s’écrouler, toute son énergie est dirigée vers lui.


Ce n’est pas de l’égoïsme, cette personne ne sait faire autre chose que de prendre soin d’elle, à ce moment-là de sa vie.


Est-ce qu’en ce moment cette relation, votre relation, est déséquilibrée ? L’un qui donne plus que l’autre et qui ne reçoit rien ou quasi rien ?
Oui, c’est évident.


Se dire aussi, accepter, que c’est une période de vie, ça n’était pas comme cela avant, ça ne sera pas comme cela non plus après.


Comprendre que la vie, avec ce train qui roule, c’est arrêtée momentanément pour cette personne et devoir faire avec.


Il sera toujours temps de reconstruire après, de vous retrouver et de trouver un nouvel équilibre.



4. Occupez-vous de libérer vos frustrations, et vos émotions chez un spécialiste


Bien sûr que vous vivez aussi une période très compliquée pour vous : l’impuissance de ne rien pouvoir faire, les inquiétudes sur son état, les inquiétudes du quotidien qui sont toujours là pour vous, peut-être vos soucis déjà présents dans votre vie avant qui, là, avec la charge émotionnelle, sont plus importants qu’avant. Vos attentes et vos idées sur cette relation que vous viviez.


Oui ça fait beaucoup à gérer pour vous aussi.


Votre entourage peut même vous dire que vous devez prendre soin de cet autre, mais vous qui prend soin de vous ? Vous pouvez même ressentir de la culpabilité quand vous aussi vous vous demandez "mais qui prend soin de moi " ?


Alors, je trouve essentiel que vous trouviez au moins une personne de votre entourage, ou même mieux, un thérapeute, à qui vous pouvez confier vos émotions, vos sentiments, sans que l’on vous juge et sans vous donner de conseils, que cette personne soit dans l’écoute et la compréhension.


 


« La vie est une succession de moments, de bons et de moins bons moments, ça aussi ça passera. »



Cet article est rédigé pour simplement donner des pistes, des réflexions, chacun fait comme il peut.


Un très beau podcast à écouter si vous voulez prolonger cette réflexion est celui réalisé par Anne-Dauphine Julliand, qui a perdu ses 2 petites filles :


https://www.youtube.com/watch?v=3dKto4Fhd-o