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Il était une fois, une immense pièce de théâtre, il y a tout ce qu’il faut pour jouer :

- Les décors, multiples, ça peut être un lieu de travail, un lieu de vie, la rue, la nature, une salle de sport ou un terrain de jeu.

- Les personnages, nous avons tout ce qu’il faut sous la main : un(e) ami(e), un conjoint, une compagne, un père, une mère, une fratrie, un chef, des collègues de travail, des profs, des élèves, …

- Les rôles :

o La victime qui s’apitoie sur son sort, qui subit sa vie, qui rejette ses malheurs sur les autres, rien n’est de sa faute ;

o Le persécuteur qui va dévaloriser les autres, les blâmer, mettre à nu leurs défauts, leur fait la morale ou les invite à se battre entre eux, et s’imagine dominer l’autre ;

o Et enfin le sauveur qui va tenter de rendre service à tout prix sous peine de se sentir coupable de non-assistance, il viendra en aide coûte que coûte.

Nous connaissons tous de superbes dessins animés ou films d’ailleurs à ce propos :

« Titanic » : Rose la victime, Jack le sauveur et le fiancé le bourreau.
« Blanche-Neige et les sept nains » : Blanche-Neige la victime, la belle-mère le bourreau et le prince charmant le sauveur.
« La ligne verte » : John Coffey la victime, Paul Edegecomb le sauveur, et Percy Wetmore le bourreau.
« Le chaperon rouge » : le chaperon rouge la victime, le loup le bourreau et le chasseur le sauveur.
« La vie est belle » : l’enfant la victime, son père le sauveur et les nazis les bourreaux.

Jusqu’à des programmes actuels, où là les rôles s’intervertissent de personnages en personnages :
« 4 mariages pour une lune de miel », « Bienvenue chez nous », et toutes les émissions de TV réalités.

Et finalement à y regarder de plus près, si si approchez-vous …. Et si cette immense pièce de théâtre était le théâtre de votre vie …. Ah dis comme ça, ça devient moins distrayant et pourtant si nous y regardions de plus près ?

I. Le triangle dramatique (ou triangle de Karpman)

 
C’est un outil psychologique créé par Stephen Karpman en 1968 qui met en évidence le jeu psychologique entre les personnes, capables de jouer les trois rôles, dans différentes situations, à différents moments.

C’est un jeu totalement inconscient qui se joue, en tout cas au début, où le déni est le maître-mot.

Prenons un exemple pour bien comprendre :
Une femme part en course avec sa fille. A peine arrivée dans le magasin, la fille touche à tout et cela rend la maman nerveuse. Pour être tranquille, la maman décide de lui acheter un livre que la petite pourra bouquiner le temps des courses. La fille lit ce livre pendant 10 minutes, puis le jette dans le caddy et lui en demande un autre. La maman refuse, s’énerve et lui répond qu’en rentrant elle le dira à son père.

Arrêt sur image. La maman est victime, l’enfant bourreau et le papa le sauveur.
En rentrant, la maman explique la scène à son mari, qui dispute la petite. La petite se met à pleurer et la maman s’en prend au mari car il la dispute trop fort !

Arrêt sur image. Changement de rôles = la maman devient sauveur, le papa persécuteur et l’enfant victime.

Et ce jeu peut durer des vies entières, en reproduisant ces schémas au travail, avec ses amis, ses collègues de travail, son chef, etc, …

Ce genre de relations, à terme, épuisent et risquent de vous enfermer dans des relations qui ne sont pas agréables. Cela ne construit pas de souvenirs positifs.
Quand on prend un rôle dans ce jeu, il faut s’attendre à court ou moyen terme à jouer tous les autres rôles.

Alors voyons de plus près ces rôles que nous jouons, à tour de rôle :

La victime:

Qui est-elle ?

On rencontre 2 types de victimes : la soumise et la rebelle.

La victime soumise exagère ses handicaps personnels et se présente plus faible qu’elle ne l’est. Elle vit ses désirs comme des nécessités impérieuses qu’elle impose à son entourage. La peur de manquer la motive.

La victime rebelle est agressive. Elle râle, elle revendique, et réclame. Ce rôle est associé à la peur de perdre quelque chose ou quelqu’un, ou de se retrouver abandonnée. Que l’on soit en position de victime soumise ou rebelle, le sentiment caché est celui de la honte.

La parfaite victime se repose complètement sur les autres. Elle ne se sent pas responsable de ce qui lui arrive. Elle a toujours des raisons datant de la préhistoire de se sentir comme elle se sent. Si ce n’est pas la faute de ses parents, c’est la faute du gouvernement ou encore celle de la société.
Peut-on pour autant la blâmer : qui d’entre nous accepte de se responsabiliser entièrement ?

Qu’est ce qui drive ce comportement ?

La position de victime s’appuie sur la tyrannie intérieure qu’exercent les peurs et les besoins associés à une personnalité qui se prend trop « au sérieux ».
La victime est manipulée par la honte et par la peur de s’affirmer.
Elle a réagi aux évènements du passé en concluant qu’elle ne valait rien. Tant qu’elle demeure dans une situation soumise ou violente, elle n’a pas à prendre le risque de s’affirmer puisque la moindre velléité serait annihilée par le persécuteur.

Bénéfice caché ?

Quoiqu’on en dise, de premier abord, ce rôle est confortable, les autres nous plaignent, nous réconfortent, finissent par compatir.
Tant qu’elle demeure dans une situation soumise ou violente, la victime n’a pas à prendre le risque de s’affirmer puisque la moindre velléité serait annihilée par le persécuteur.
Le besoin de sécurité est sans aucun doute un des plus profondément ancrés en nous.

Le persécuteur:

Qui est-il ?

Le persécuteur est à la fois convaincu de sa valeur, et que cette valeur a été bafouée, il réagit en agressant plutôt qu’en se soumettant pour prouver au monde ce qu’il vaut.
Il s’agit presque toujours de rétablir une estime de soi défaillante en forçant le respect d’autrui par la domination et/ou les coups. Il suffit d’une remarque pour éveiller la colère liée aux situations du passé.
Le persécuteur juge sévèrement, blâme, cherche à dominer l’autre, l’accuse, tente de le rabaisser. Il peut devenir agressif, voir violent.

Qu’est ce qui drive ce comportement ?

Du côté du persécuteur, c’est la colère qui domine. La personne placée dans ce rôle se croit obligée ou estime efficace d’être sévère, voire méchante, alors que ce n’est pas nécessaire.
Le persécuteur est souvent quelqu’un qui cherche à se venger d’une frustration. Cela lui donne la force et l’aveuglement nécessaire à l’affût d’une bonne victime ou d’un bon sauveur pour le transformer en victime.
Le persécuteur est donc manipulé par la colère et par la peur de montrer sa vulnérabilité.

Bénéfice caché ?

Les actes violents (verbales ou physiques) servent à rassurer un être profondément terrifié mais qui l’ignore. L’humiliation et la dévalorisation d’autrui lui permettent d’éviter d’affronter la différence. Le persécuteur est psychiquement si fragile que l’existence même d’une personne dont les volontés sont différentes des siennes lui est intolérable. Il choisit donc pour partenaires des personnes qui ne sont pas trop affirmatives. Il peut ainsi leur faire subir toutes les humiliations qu’il a lui-même rencontrées. Il n’est donc jamais confronté à sa propre fragilité, au lieu de vivre ses douleurs, il les transfère sur quelqu’un d’autre.

Le sauveur:

 
 Qui est-il ?

Il viendra en aide coûte que coûte, peu importe s’il n’a ni le goût, ni les capacités, ni le temps de le faire. Il va tenter de rendre service à tout prix sous peine de se sentir coupable de non-assistance.
C’est que le sauveur abuse de ses propres forces. Il ne met pas de limites à l’aide qu’il peut apporter et par conséquent se retrouve victime de son action et de ses bonnes intentions. Après un certain temps, la situation provoque tellement de frustration en lui qu’il se durcit et répond par la colère. Ce qui le transforme sur le champ en persécuteur.
Alors, celui ou celle qui a un penchant pour le sauveur devrait s’entraîner à répondre ceci aux victimes qui croisent sa route : « mon Dieu ! C’est terrible ce qui t’arrive ! Qu’est-ce que TU peux faire, dans la situation ? »

Qu’est ce qui drive ce comportement ?

Chez le sauveur, la culpabilité domine.
Le sauveur est manipulé par la culpabilité et la peur de faire de la peine aux autres en posant une limite.
Il n’est pas à l’écoute de ses propres besoins, il s’adapte aux besoins des autres, ce qui à la longue peut engendrer beaucoup de frustrations et de souffrances internes.

Bénéfice caché ?

L’intérêt du Sauveur est bien plus évident, car devenir Sauveur c’est tenir un rôle plutôt gratifiant. Il permet d’avoir une bonne image de Soi, et aussi une bonne image auprès des autres. Mais ce n’est pas tout, car cela lui apporte de la satisfaction que quelqu’un lui fasse confiance et il se réjouit d’avoir quelqu’un dépendant de lui, et donc d’avoir du contrôle sur lui.

II. Quelques pistes pour en sortir, vous réapproprier votre pouvoir et améliorer vos relations personnelles et interpersonnelles

1. Prenez de la hauteur / Responsabilisez-vous

Pour moi les deux vont ensemble.

La chose la plus évidente à faire, et la plus difficile peut-être, est de choisir de ne pas entrer dans ce jeu. Pour cela, il faut prendre de la hauteur, vous détacher, pour analyser ce qui se joue et choisir, en conscience, de ne jouer aucun rôle.
Cela demande une attention accrue, et pour vous aider à reconnaître et ne pas entrer dans ce jeu, jouez à un autre triangle : le triangle « pouvoir, puissance et permission »

« Un grand pouvoir implique de grandes responsabilités. »
 

Pouvoir :
Quand une personne fait sa victime ou veut que je la sauve, mon job est de lui renvoyer sa responsabilité.
Par exemple : « explique-moi comment ma fille s’autorise ça avec toi et qu’elle ne le fait pas avec moi ? »
On cherche une ouverture au dialogue, il n’est pas question ici de faire des reproches ou de dire « comme je suis mieux que l’autre » mais de discuter sur un ton d’adulte à adulte et surtout à responsabiliser l’autre sur son comportement.
Ainsi on évitera d’alimenter le jeu et il cessera de suite.

Puissance :
« Qu’est-ce que tu pourrais faire pour reprendre ton autorité ? »
Il est question ici de trouver un savoir-faire que la personne pourrait développer pour ne plus se retrouver confronter à ce problème.

Permission :
« Quelle autorisation tu vas pouvoir te donner ? »
Souvent c’est parce que nous ne nous autorisons pas … dans cet exemple-là, à être en colère, ou encore à punir car cela ne se fait pas (dans nos croyances), que nous nous frustrons et nous mettons en colère.

« Qu’est-ce qui est le plus important pour vous ? Le conflit que vous créez ou la relation que vous avez ? »

2. Soyez factuels

Avec une personne qui tente de vous prendre à parti, qui veut vous mettre à mal, restez factuel, des faits et rien que des faits. Ainsi les émotions sont mises à distance et l’autre ne pourra pas s’en servir contre vous. Un rapport d’égal à égal se crée, on sort de la relation de pouvoir.

3. Se connaître (valeurs / besoins)

« Qu’est-ce qui est important pour vous ? »
Une fois que l’on met en évidence ses valeurs fondamentales, sur lesquelles nous ne souhaitons pas négocier car elles sont vitales à notre équilibre et que nous prenons conscience de nos besoins, nous devenons acteurs de nos vies.
Naturellement, nous ne voudrons plus jouer un jeu, que ce soit celui de victime, car je suis responsable de mes réactions face aux évènements de la vie, ni de bourreau car je n’ai plus à me battre pour que mon avis soit LA vérité, chacun son cheminement, son passé et ses expériences et plus sauveur non plus car chacun est responsable de sa propre vie, je n’ai donc pas à intervenir pour sauver l’autre.

4. Poser vos limites

Une fois que je suis au clair avec mes valeurs et mes besoins, que je les assume et me permet de les vivre dans mon quotidien, je poserai mes limites beaucoup plus facilement. Je ne me laisserai plus définir par les envies des autres, je me connais suffisamment pour dire non ou oui en toute conscience et respecter mes engagements, sans me plaindre, en prenant mes responsabilités.